Une Vie Trépidante (épisode 2)




Une Vie Trépidante

(épisode 2 : comment j'ai vaincu la douleur et ce-faisant acquis une âme immaculée)


Dans l'épisode précédent : Alors qu'un événement électrique inédit se produisait, j'accueillais chez moi trois militaires gourmets et un superbe pied de verveine.


Onze heures quarante deux :
Vendredi 29 mars. Je me réveille d'une longue et profonde nuit. Peu de souvenirs de la soirée (mettons nous bien d'accord sur le fait suivant : les seuls liquides ingurgités furent de la soupe et de l'eau temperée).
Il me semble qu'un démon loge depuis quelques semaines dans le conduit de mon oreille droite et cette fois-ci c'en est trop. Ça me brûle et paralyse machoire et mandibule. Je m'en vais chez le guérisseur.


Quatorze heures douze :
Le médecin m'invite à entrer. Elle observe attentivement l'intérieur de mon oreille avec son otoscope et fronce les sourcils :
- C'est bien un démon...
- J'en étais sûre !
Elle marque un temps d'arrêt.
- Vous avez ingéré un doliprane avant de venir ? Parce que là je dois l'enlever et sinon franchement vous aller douiller.
- Non, je sais. Figurez-vous que je me suis préparée à cette idée et que j'y vois l'occasion de transformer mon âme.

- A trois je vais introduire mon crochet dans votre oreille pour déloger le démon ainsi que ses effets personnels. Vous ressentirez probablement une douleur extrême, à la limite de ce que le corps humain peut supporter.

1....2...3...

Et c'est ainsi qu'une douleur extrême se répandit dans toute ma boîte crânienne et la partie droite de mon corps.

Le médecin se confondait en excuses empathiques, couvertes par les beuglements sourds du démon. Elle ne parvint pas à le déloger totalement mais elle me montra dans le bac posé sur la table d'examen tous les éléments* qu'elle avait réussi à extraire :
- un sac de couchage orange
- des allumettes
- un album photo des plus beaux feux de la Saint Jean de France
- un tapis de sol
- des boules Quiès
- un petit pull bleu en coton torsadé
- quelques bûches de bois


* Bien sûr tout ceci sont des objets d'échelle largement moindre que nos références. De plus, vous ne pourrez pas retrouver ces articles dans les points de vente traditionnels puisqu'ils sont miniatures, et de surcroît démoniaques.


- Il faisait des feux...
- Quelle enflure...
- Bon, sans ses affaires il devrait partir d'ici quelques jours. Voici l'ordonnance pour les gouttes : vous faites des bains d'oreille matin et soir pendant cinq minutes et vous rincez. Si dans quelques semaines il rallume un feu, il faudra aller chez l'ORL.
- Ok cowboy.
- Vous voulez récupérer ses effets personnels ?
- Nan mais ça va pas, je ramène pas ça chez moi...
- Oui comme vous avez raison, que vous êtes intelligente ! Sans mentir, si votre ramage se rapporte à votre plumage vous êtes le phœnix des hôtes de ces bois.
- !

Et nous voilà repartis à travers la ville, mon âme neuve et mon corps endolori.

Quatorze heures quarante cinq : 
Heure du goûter : banane.
Banane, banane, banane, banane, banane, banane, banane...

Seize heures trente : 
Retour à la maison. Bain d'oreille.

Dix-sept heures : 
Je débarbotine en débardeur. Ma cuisine est un sanctuaire. J'écoute de mon oreille valide une émission sur l'histoire de la philo chinoise et c'est pas de la tarte.

Vingt-deux heures :
Grâce à un ami instruit, j'acquiers un nouvel enseignement en lui rendant son ciseau à bois : NE JAMAIS TENDRE UN OUTIL DANGEREUX DU COTE DANGEREUX. TOUJOURS PAR SON MANCHE.

Vingt-quatre heures : Je dîne d'une orange, pour la beauté du geste, et m'endors affamée.

(Suite au prochain épisode...)

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