Trois mois





[Ah ! J'ai tant ri toutes ces années.
Je fus si vigilante à cultiver l'absurde
défiance envers la vie trop lourde,
et contre la violence, il fallait bien s'échapper. 
Mais j'ai toujours honte d'être triste
et lorsque je deviens poreuse.]

Je ne dis rien, je suis un mauvais enfant
mais je pense à toi tous les jours
mais ça ne m'échappe pas
ni la tendresse ni l'inquiétude quand tu m'observes
et que mes mots se fragmentent et ne savent plus rien dire.

Pourtant je sais bien que me voici bientôt orpheline.
Explique-moi comment se défont les liens. A quel moment m'as-tu trouvée ?
Le monde aurait-il seulement été possible sans toi ?

Cette existence qui s'achève sous les nuits laiteuses : des nuits de lune pleine.
Tu m'as dit qu'à chaque fois tu t'inquiétais : "Tiens, je sais que ma sœur ne dort pas."
L'absence me brûle déjà  au creux du thorax.

Et bien sûr nous rions durant le déjeuner, si démunis, veillant ton vieux corps épuisé.
C'est une affaire interne, et chacun s'arrange.
C'est l'impuissance qui fatigue : frappe brusque en plein courant de la quotidienneté.

Désormais, j'ai le cœur humide et craintif.
















Commentaires

Articles les plus consultés